Comment se passe mon voyage? 

Ça dépend à quel moment on pose la question. Quel jour, quelle heure même.  Les émotions du voyage passent comme les nuages dans le ciel parfois sous un ciel gris et sombre et parfois clair et ensoleillé. Je navigue dans les réflexions et les émotions, comme sur une mer houleuse. 

Est-ce que tout peut aller merveilleusement bien dans un voyage de recherche?  En vacances peut-être, quand devant soi la mer est belle et le bouquin envoûtant. Mais quand on essai de comprendre les conflits, les bas et les hauts d’une société, d’une famille, la mer n’est pas toujours calme. 

Hier je me suis couché à 19 heures. La  nuit dans un train dont les freins m’offraient, à chaque arrêt, un réveil brutal. Les arrêts ont été nombreux. Un levé du soleil dernière des vitres crasseuses m’a impatienté. Pourquoi ne lave-t-on pas les vitres des trains? Puis un pipeline à ciel ouvert sur une terre plate et sablonneuse de fin d’automne. Une laideur qui m’a assommé aussi fort que le trajet et j’aurais voulu que la nuit ne se termine pas. Et comme la laideur se poursuit quand on entre dans une ville en train, j’ai commencé ma première journée en Azerbaijan sur la réflexion de mon goût de la beauté. 

Et j’étais un peu maussade, crevée et  je ne rigolais pas quand il fut temps de négocier les taxis. J’ai réussi à passer de 40 à 10 manat.  Finalement ça aurait dû être 5.  Maintenant c’est Bolt, un concurrent d’Uber dans la région. Pas de négociations et d’explications sur la destination. Comme en Georgie, les chauffeurs de taxis ne connaissent pas la ville et ne semblent pas intéressés à connaître et mémoriser le nom des rues. Les locaux rigolent quand on arrive en retard découragé. 

L’appartement du Airbnb n’est pas prêt. Je dépose mes sacs et je cherche un café. Il n’y qu’un centre d’achat de quartier. C’est l’ouverture. Je n’ai jamais été inspirée d’aller manger ou prendre un café dans les centres d’achats. Un certain manque de poésie dont mon humeur aurait bien besoin après la nuit mouvementée et un levée de soleil raté, sur la plaine désertique d’Azerbaijan.

Impermanence

Comme tout est impermanence, j’entre dans l’appartement, je vais sur le balcon et qu’est-ce que je vois?  La mer Caspienne et l’esplanade de Baku qui m’attire. Tout ça  sous un beau soleil et un 15 degrés sans vents du nord.  Tout va s’arranger!

La plus belle façade

Pas trop envie de rester dans l’appartement.  Prenons la route, il me faut une carte sim et un numéro de téléphone. Je retrouve l’esplanade et le bord de mer. L’art et la beauté de la nature sont les meilleurs médicaments aux humeurs maussades. Le train est oublié, mes lunettes sont propres pour voir ce nouveau pays. Pays pétrolier, ce que je vois en arrivant est sa plus belle façade.

J’ai marché 4 heures et j’ai repris esprit et vie devant le charme de Bakou où le vieux, le moderne et les construction soviétique se marient richement. J’aime la couleur à la ville. Je revois la couleur de Malte. Cette pierre apporte de la douceur aux villes.

Je suis revenue en taxi complètement exténuée. Mes pieds vont bientôt mériter de meilleurs souliers.  J’ai une journée pour ne pas penser à, là d’où je viens, et à ce que je découvrirai demain. Surtout que la dernière personne,  à qui j’ai parlé avant de prendre le taxi vers la gare de Tbilissi, m’a assommée. Un restaurateur qui a été chef à New York pendant 8 ans, qui me dit ne pas aimer être de retour. « Dès que je vends mon restaurent, je quitte le pays. Ici, ils sont racistes, ils se plaignent tout le temps. Ils sont paresseux, les femmes font tout le travail pendant que les hommes restent assis à ne rien faire. » me dit-il de son peuple. Et c’est sur cette déclaration négative que je quitte la Géorgie. Je suis bouleversée car j’ai aimé ce pays et ses gens. Une bonne chance que j’y reviens autour du 25 décembre et que je le quitterai une deuxième fois avec, j’espère, un message plus positif.

On ne veut plus qu’elles reviennent

Il n’était pas le premier à me dire que les femmes travaillent plus que les hommes.  Les femmes me l’ont dit aussi.  Ce sont elles qui vont travailler à l’étranger et qui font parvenir l’argent à la famille, au mari et aux enfants. Un apport financier important pour le gouvernement. Les femmes m’ont dit qu’elles sont furieuses quand elles voient les hommes recevoir l’argent et se la couler douce avec une maitresse sans travailler. Et ces, qui font le ménage et qui prennent soin des vieux des pays de l’ouest, on ne veut plus qu’elles reviennent.

« À l’ouest, c’est beau, c’est clean, mais c’est ennuyant »

Je passe d’un pays pauvre avec inégalités à un pays riche avec aussi ses inégalités.  Mais avec nos gouvernement, la démocratie devra faire peau neuve pour qu’on la désire.  La démocratie a perdu sa réputation. Il y a autre chose que ce que l’on offre.  « À l’ouest, c’est beau, c’est clean, mais c’est ennuyant ». C’est si excitant un pays à construire! Ils sont peut-être chanceux de ne pas avoir tout ce que nous avons.

J’imagine l’énergie et l’aventure, si au Québec, on décidait de se construire un pays.

Mer Caspienne, toi qui te montre si belle, es-tu propre?  Une amie, rencontrée ici, me raconte comment elle pleurait quand sa mère l’obligeait à manger du caviar. Elle en avait toujours des gros pots tout pleins. Aujourd’hui, la mer est polluée, les esturgeons disparaissent, et le caviar n’est pour ceux qui peuvent s’en offrir à des prix criminels.   Car criminel est le mot n’est-ce pas?