L’essentiel sans superflus

Depuis ses débuts, le milieu de l’aide au développement a tenté d’atteindre ses objectifs en faisant appel à de nombreux slogans visant à nourrir notre compassion et notre générosité pour que nous versions notre argent aux différentes causes humanitaires. J’ai commencé à voyager en Afrique au moment de la grande mode du slogan « La lutte contre la pauvreté ». La banque mondiale en a fait sa raison d’être. Ils ont dû transformer ce slogan en « La lutte pour la réduction de la pauvreté » quand il a été évident que la pauvreté n’allait pas être éliminée. La course vers la richesse le sera bien avant.

Les moyens de communication modernes aidant, voilà qu’on pouvait afficher partout des « posters » de cette campagne «La lutte contre la pauvreté». Lors d’une rencontre des Nations unies au Malawi, un paysan a demandé: «Que se passe-t’il? Est-ce qu’on vient juste de devenir pauvres ou est-ce que vous venez juste de vous en apercevoir?»

Albert Révoédjrè, auteur de «La pauvreté richesse des peuples» écrit ceci: «Tous les dictionnaires un peu complets témoignent que « pauvre » veut dire aussi « qui a tout juste le nécessaire, qui a ce qu’il faut, mais non le superflu ».

En lisant cette définition, je me suis posé la question: «Et si nous nous trompions et que le vrai objectif à atteindre soit plutôt que tout le monde devienne pauvre?»Je me suis demandée si tous ces messages que l’on reçoit, attestant que le succès c’est la richesse, ne seraient pas une erreur de marketing  et de communication de l’humanitaire et de l’humanité ? Serait-il possible que ce message dont on affuble le monde soit un des plus grands malentendus de l’histoire humaine ?

L’impossible

On nous dit qu’il nous faudrait deux, trois et même quatre planètes Terre pour que tous les êtres humains vivent dans les mêmes conditions de vie qu’en Occident, pour que tous puissent vivre en commettant les mêmes abus envers l’environnement. Cela veut dire qu’il est impossible pour l’ensemble des habitants de la Terre d’être riches économiquement à la façon occidentale. Alors si nous ne voulons pas de personnes pauvres et si, pour sauver la planète nous ne désirons pas que tout le monde soit riche, que souhaitons-nous donc ?

« L’essentiel pour tous » serait un slogan plus approprié peut-être, la bouffe sur la table quand les enfants reviennent de l’école, un établissement scolaire, un centre médical tout près. Que Catalina y aille à cheval c’est très bien; ainsi elle ne pollue pas la planète. Mais on va lui dire qu’elle est pauvre et elle voudra une voiture. Et quand elle aura sa voiture, on viendra lui dire qu’elle pollue la planète ? Que les enfants marchent 60 minutes pour se rendre à l’école ne fait pas d’eux des pauvres. Mais quand ils doivent marcher trois heures à l’âge de 6 ans pour y aller alors nous savons qu’il y a là un problème à résoudre.

 

 

ET si nous avions recherché la beauté? Qu’aurions-nous découvert? 

Beauté…pouvez-vous m’inspirée? 

Je suis pour l’éveil de notre compassion envers les humains qui sont dans la misère et pour notre engagement à éliminer les injustices de ce monde, mais je ne suis pas d’accord avec les grands appels à la lutte contre la pauvreté. Je crois que tout ce qu’on va réussir à faire, c’est d’aller dire aux autres qu’ils sont pauvres et de faire en sorte qu’ils se sentent petits, minables, honteux. Je propose aux revues telles Forbes Magazine, qui ont l’habitude de leur faire honneur en établissant annuellement la liste des gens les plus riches du monde, de nous créer une liste des personnes les plus riches qui partagent le moins. Il n’est jamais agréable de se faire pointer du doigt. Qui sommes-nous pour aller de par le monde dire aux autres qu’ils sont pauvres ? Pauvres de nous ! Qui sommes-nous donc pour avoir détruit la richesse des ressources de notre planète en éliminant tout ce qui faisait obstacle à la satisfaction de nos besoins immédiats, sur notre chemin ?

Quelqu’un peut-il aller dire à Catalina qu’elle est pauvre ? Je n’oserais pas infliger une telle insulte à cette femme si riche de beauté, de persévérance et d’espoir…et privilégiée de posséder un mur de bambou, pénétré de soleil et de doux vents !

Pourquoi ne pas aller de par le monde et déclarer : « J’ai besoin d’aide, pouvez-vous m’inspirer ? » Est-il possible que nous nous enrichissions mutuellement par nos expériences et nos connaissances ? Depuis 60ans et plus, nous avons parcouru la planète à la recherche de la pauvreté. Qu’avons-nous trouvé? De la pauvreté! Et si nous avions recherché la beauté ? Qu’aurions-nous découvert ?

Je propose que pour les six prochaines décennies nous recherchions la beauté.

Ce n’est pas de la pauvreté dont il faut parler, mais de la misère.

Ce n’est pas de la pauvreté dont il faut parler, mais de la misère. L’humanité m’a enseigné, que là où il y a de la misère, il y a un manque d’amour. Il y a de la misère dans les familles où les parents n’aiment pas leurs enfants. Et il y a trop de parents qui n’aiment pas leurs enfants. Il est essentiel de le dire haut et fort. Il y a de la misère dans les maisons où les couples ne s’aiment pas, dans les classes où les enseignants n’aiment pas leurs élèves, chez les gens qui travaillent pour des employeurs qui n’aiment pas leurs employés, dans les villes où les maires n’aiment pas leurs citoyens et dans les pays où les chefs d’État n’aiment pas leur peuple. Et il y a de la misère partout dans le monde et autour de chacun de vous. Tout problème, quel qu’il soit, provient d’un manque d’amour à la racine.

La misère menace la vie du coeur et pour l’éliminer il est indispensable de parler d’amour. Toutefois les mots amour, cœur, esprit et âme ne sont pas dans les documents des Nations unies ni dans ceux de nos gouvernements, de nos agences d’aide ou de nos entreprises? Ces mots sont laissés aux représentants des différentes religions qui s’en servent à cœur joie pour convaincre leurs fidèles, pour les sécuriser ou pour leur faire peur. Les organisations internationales, elles, promettent un monde économiquement meilleur. Je ne suis pas un être économique et je ne fonctionne pas au pétrole. Je fonctionne à l’amour, à aimer et à être aimée. Et vous ?

La où il y a de la misère, il y a un manque d’amour

Le développement des habiletés du cœur est essentiel pour obtenir une économie équilibrée, une démocratie généreuse et des leaders honnêtes. Parents, aimez vos enfants ! Enfants, aimez vos parents, vos frères et sœurs ! Politiciens, comment pouvez-vous ressentir de la fierté à être chefs d’État de gens miséreux ? Aimez votre peuple !

Nous tous, aimons la Terre et l’Univers.

Extrait: Voyage au Coeur de l’Humanité
par Hélène Tremblay
Publication Espace Humain, 2010
d’après la conférence du même nom.