Il y a en nous un appel naturel vers le dépassement de soi auquel nous cherchons constamment à répondre. Comment alors devenir citoyen du monde, habitante de la terre, une avec le tout,  si nos conditions physiques, nos moyens d’existence, nos rêves locaux ne nous permettent pas de voyager et d’aller sur place découvrir le monde, ses odeurs, ses goûts, ses rythmes et tout ce qu’il offre au voyageur ? 

Cette question devient chaque jour de plus en plus importante pour moi et il est essentiel que je tente d’y répondre. Voltaire et tant d’autres ont affirmé que l’on peut faire le tour du monde, mais que c’est dans son jardin que l’on découvre son propre trésor, sa paix intérieure. Facile à dire après avoir fait le tour de la terre. Aujourd’hui, ce privilège ne doit pas être limité aux voyageurs, mais être accessible à tous. Nous ne pouvons pas habiter tous les pays du monde, mais nous pouvons faire en sorte que le monde nous habite. 

Le plus difficile à intégrer et à accepter dans le développement de notre personne en tant que citoyen du monde et habitant de la terre est notre « petite vie ». Avec nos limitations physiques, géographiques de temps ou de moyens, comment voir de la grandeur dans notre routine quotidienne ? J’ai connu des gens qui étaient très satisfaits d’être exactement là où ils étaient à s’occuper de leur famille ou de leur communauté proche. D’autres ont des enfants, des responsabilités locales et sont toujours en train de penser que le monde a besoin d’eux ailleurs. Ils veulent sauver le monde et oublient le bonheur de ceux qui les entourent. Ils ont fait des enfants, mais l’ailleurs leur crie de venir. 

Nous pouvons partir loin, là où nous croyons que la vie sera plus exotique, meilleure, et que nous pourrons participer plus concrètement à changer le monde, mais peu importe où nous sommes sur Terre, une fois loin des regards, la porte fermée sur notre solitude, nous nous retrouvons seul devant notre « petite vie ». 

Nous pouvons être plus riches, plus puissants militairement, plus connaisseurs dans une matière ou dans une autre, mais c’est seulement en esprit que nous pouvons être grands. C’est en incluant le monde entier dans notre pensée que nous sommes grands. C’est aussi à ce moment-là que nos petits gestes prennent toute leur beauté. 

Je cherche toujours à comprendre pleinement et vivre le fait que je suis une avec le tout. Être citoyen du monde, c’est être fier de la vie sous toutes ses formes. C’est un sentiment qui nous habite et qui confère une plus grande dimension aux gestes qu’on accomplit quotidiennement dans nos maisons et dans nos communautés. Ainsi, nous apprenons que nous sommes simultanément « grands » et « petits ». Cela signifie que nous faisons partie de l’histoire de l’univers, de l’histoire de la planète, de l’histoire de notre communauté et de notre famille. 

Je suis bien heureuse d’avoir un petit jardin. Parfois, pendant le nettoyage du printemps et de l’automne, il me paraît bien grand. La vie a été généreuse en n’exigeant pas que ma responsabilité soit de jardiner la terre entière. Aussi, quand je joue dehors et que je me penche sur mes plantes, j’ai moins l’impression de travailler et davantage la sensation d’embellir ma planète. À ce moment, je suis ainsi « une » avec tous les citoyens du monde qui sont, au même moment, penchés sur leur lopin de terre. 

Je mets une fleur à la fenêtre de ma maison, mais je ne peux pas mettre des fleurs dans toutes les fenêtres de toutes les maisons du monde. Alors, en regardant ma fleur, je pense à Catalina au Paraguay qui cherche à embellir sa maison, je vois Eugénia en Moldavie et Ayushjav en Mongolie qui sont en train de broder un nouveau coussin pour colorer un peu plus encore leur habitat. En mettant un tout petit peu de beauté dans ma propre vie, soudain, mon geste se multiplie et mon esprit est rempli de la beauté du monde. 

Quand je vois un enfant faire ses premiers pas, je vois 70 millions d’enfants faire leurs premiers pas et autant de personnes qui sourient en accueillant cette première grande victoire humaine. Malgré tous les malheurs qui l’habitent, ma planète est ainsi, régulièrement, une entité souriante. 

Nous ne pouvons sourire à toute l’humanité, mais nous pouvons sourire à notre voisin tout en sachant que nous sourions ainsi à toute l’humanité. Un exercice, qui chaque fois, nous fait comprendre comment on peut être citoyen de toute la terre grâce à la grandeur de notre esprit. 

Être un citoyen du monde est un exercice constant. Prendre un événement et le multiplier par les millions de fois qu’il se répète chaque jour sur la terre est un exercice que j’aime bien. C’est ma façon d’intégrer le monde à ma vie quotidienne. C’est en connaissant nos similarités humaines que nous pouvons grandir ensemble. 

Ils sont nombreux ceux qui cherchent des solutions aux maux de l’Humanité et qui nous parlent de notre propre paix intérieure et de la paix sur la terre. Il est impossible de s’intéresser à celle-ci sans essayer de proposer nos propres solutions.  J’en ai quelques une aussi.

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Source VOYAGE AU CŒUR DE L’HUMANITÉ, 2010  – p. 133