Avant de quitter Montréal, j’avais reçu le conseil de rechercher, au Bengale Occidental, une famille d’artisans. Le hasard n’existe pas, alors, une fois en Inde, j’ai aussi reçu l’invitation de faire partie d’une équipe internationale pour évaluer un projet initié par l’Unesco et le « Department of Micro, Small & Medium Enterprises & Textile « dans 10 villages d’artisans. Un projet qui croit qu’artistes et artisans peuvent vivrent de leur art et participer au développement économique de leur région.
J’ai visité trois villages d’artisans et j’ai habité avec une de leur famille. Mais avant, j’ai choisi un village ordinaire de fermier. Ceci parce que je n’avais pas l’impression d’avoir le choix. Quand il y a des comités, il y a des présidents de comités et quand il y a des présidents, il y a des jeux de pouvoir. Ma méthode consiste à visiter quelques familles et en choisir une. Là, dans le village du district de Bardhaman, je sentais qu’on tournait autour du pot et que ceux qui m’accompagnaient, avait déjà décidé dans quelle famille j’allais vivre. Souvent c’est que l’on ne peut pas s’imaginer que je peux vivre sans avoir toutes les commodités. Parfois j’ai l’impression que c’est pour le privilège de recevoir une étrangère. Et souvent je suis allergique à tout ce qui a odeur de contrôle. Cela me donne envie de fuir.
J’ai vu que l’on me faisait attendre jusqu’à ce que les heures de la journée aient ma résistance. J’ai alors demandé d’aller visiter des familles dans le village voisin, où paraît-il on y cultivait le jute. Ce qui était différent tout de même. Afin de ne pas répéter l’information reçue au Karnataka, je cherchais autre chose que la récolte du riz. Au Bengal Occidental, il y a les fermes de jute. Je ne m’étais jamais attardé à me demander d’où venait le jute. Le jute semble faire partie de ma vie depuis toujours. J’ai souvent vu des sacs de patates mais on ne m’a jamais parlé de leur fabrication.
Toutefois, dans ce village d’a côté, il n’y aurait pas d’artisans. Ce sont des fermiers depuis toujours. Les castes d’artisans, eux, traditionnellement n’ont pas de terres. Aujourd’hui dès qu’ils peuvent, ils en achètent à ceux qui partent à la ville. Ils sont rares les artisans qui vivent seulement de leur art. Aujourd’hui on les aide avant que leur art meurt. (plus à venir)
Quand je me suis retrouvée dans la cour de la famille Biswas, je m’y suis sentie bien. Un aspect de normalité, un sentiment de vie vraie et de tranquillité. Aucun jeu de pouvoir. C’est fascinant comme tout se sent si rapidement. Ca serait ici, non pas chez l’oncle ou le premier ou le deuxième cousin. Je n’irai pas chez un membre du comité. Discussion terminée.
Tout autour de moi, je ne voyais que des champs de riz. Dans la cour, le vieux père , le gardien de la famille et son épouse, leurs deux fils et leurs familles. Les frères Biswas venaient de finir de planter le riz, ils récoltaient chaque jour graines de moutarde et s’employaient soit à la fabrique de briques ou chez d’autres qui avaient besoins de leur services. Pour le jute, il faudra revenir. Ce n’était pas la saison. Une fois que la récolte des graines de moutarde serait terminée, on préparera la terre pour le jute qui est une récolte du temps des moussons. Une récolte qui aime la pluie et beaucoup d’eau. Bon bon.
Alors par de canne à sucre au Karnataka, pas de jute au Bengale Occidentale. Pas facile d’obtenir ce que l’on veut! Mais j’ai vite oublié les récoles. Il y avait le festival Hindou qui célèbre Saraswati, la déesse de la connaissance, de la musique et de l’art. Et ceci en pleine période d’examen. Il y avait bien des raisons de prier.
Je suis bien heureuse d’avoir traversé le champs de riz qui sépare les deux village pour me retrouver chez les Biswas. Ici, les femmes étaient plus instruites que leurs époux. Chacun avait son rôle et chacun sa tâche selon ses talents. (plus à venir). Aussi heureuse de savoir que je dors toujours bien sur la natte sur un lit de bois. Peut-être le même bois que les sièges du train qui m’a amenée de Kolkata à Agradeep.
Après 4 jours, quand ma présence fut oubliée et que chacun était à sa tache, je suis retournée vivre dans le village d’artisans. Alors que je croyais qu’ils vivaient plus richement, j’avais compris que les fermiers vivent beaucoup mieux que les artisans. Finalement d’avoir visité les deux villages m’a permis de mieux comprendre chacun et de voir comment côte à côte ils vivaient différemment. (plus à venir)
Note: Comme nous sommes à l’ère des histoires courtes, j’en garde!